À la fois moment de vie et matériau artistique, le voyage permet aussi de déambuler à travers les accidents du paysage. À la recherche de bribes et de détails susceptibles d’évoquer un imaginaire, Cléa Darnaud cherche à infiltrer le réel pour en saisir des fragments et les recomposer dans mon univers plastique.
Elle explore le champ de la miniature par des gravures très fouillées, gravées à l’aiguille et privilégiant les techniques de l’eau-forte et de l’aquatinte. Ces estampes, interrogeant les notions de récit et narration, invitent à une déambulation mêlant réalité et fiction.
Figer la labilité d’une fumée par le trait, saisir les contours d’un corps, défaire les lignes d’un fleuve : son projet tente d’évoquer un parcours où la gravure révèle des paysages transformés, sauvages ou urbains. Son processus de travail s’établit autour d’une ville ou d’un territoire. Les éléments tirés du réel, manipulés, sont mis en exergue par le jeu des compositions et des titres évocateurs.
Son travail demeure intimement lié à la littérature, des auteurs comme Andreï Makine, et Franz Kafka mais aussi des cinéastes tels qu’Aki Kaurismäki ou David Lynch nourrissent son imaginaire. Elle désire interroger la question de la perception, qu’elle ne soit pas immédiate mais plutôt l’activer par les détails, laisser le champ d’interprétation ouvert. Elle souhaite parler d’un territoire qui n’est ni l’immédiateté de notre présent, ni un passé nostalgique, ni une projection dans le futur, mais bien les trois intrinsèquement enchevêtrés.
Son travail consiste à construire un dialogue, il propose de confronter les regards ; l’aller-retour incessant entre la projection imaginaire que l’on se fait d’un lieu et la confrontation avec le réel.
Elle tente de scénariser le quotidien par une mise en scène poétique : des fragments de conversation, un objet ou une situation particulière peuvent donner lieu à une image. Sa démarche s’inscrit dans une forme de repérage cinématographique. Sillonner la ville, prélever des extraits et construire un nouveau récit. Il est important que les sources, à la manière d’un jeu de piste et bien que souvent cachées, demeurent réelles. Elle s’intéresse au regard sur ces détails et leur transposition dans une narration nouvelle.
Elle utilise le sentiment de déracinement et d’enthousiasme inhérent à la découverte d’un pays comme moteur de production artistique et créateur de fictions.
C’est lors d’un stage à l’atelier du graveur danois Bo Halbirk à Paris qu’elle se passionne pour cette technique et décide de poursuivre ses études à Paris à l’école Estienne en atelier de gravure.
Diplômée avec les félicitations du jury en 2016, elle obtient le Prix de perfectionnement aux métiers d’art de la ville de Paris et intègre l’atelier de gravure de l’Imprimerie Arte – Adrien Maeght.
Elle participe à plusieurs résidences artistiques à l’étranger, notamment en Finlande à Jyväskylä, au sein de la galerie et Centre de l’Image Imprimée Ratamo durant trois mois.
Au mois de février 2019, elle part un mois au Groenland pour participer à la résidence Artistes en Arctique 2019 à bord du Manguier, un remorqueur pris dans les glaces.
Lauréate de la résidence organisée par les Pépinières Européennes de Création et la Coopérative Méduse, elle réside à Québec d’avril à juin 2019 pour une résidence de trois mois au sein de l’atelier de gravure Engramme. Elle est sélectionnée pour participer à la 11e Biennale Internationale d’Estampe Contemporaine de Trois-Rivières, qui se déroule de juin à septembre 2019 au Canada.
À la fois artiste et professeur de gravure, elle vit et travaille actuellement à Paris.